Des couverts pour limiter l’érosion sans concurrencer la vigne en contexte méditerranéen

En Provence, l’un des principaux objectifs de l’implantation de couverts végétaux en vigne est de limiter l’érosion des sols. Retour d’expérience avec Marjolaine de Renty, consultante viticole à l’ICV Provence.

« Dans notre secteur, l’érosion des sols par les pluies intenses est une problématique importante. Un gros orage peut emporter 10 cm de bonne terre… et des années de travail. Seulement 1 mm de sol est formé en moyenne par an », rappelle Marjolaine de Renty, consultante viticole à l’ICV Provence. D’autres effets bénéfiques des couverts sur le sol sont également recherchés : meilleure pénétration de l’eau dans le sol, amélioration de la structure et de la vie du sol. La pratique des couverts ne manque pas d’atouts, mais le contexte méditerranéen et sa faible pluviométrie requiert une validation des itinéraires.

Marjolaine de Renty est consultante viticole à l’ICV Provence et suit les essais de couverts. Photo : ICV Provence
Dans ce cadre, des essais sont menés depuis trois ans par l’ICV au Luc-en-Provence dans le Var, comparant à la modalité « classique » du travail du sol trois modalités enherbées. « Nous implantons le même mélange de couverts, avec différents itinéraires techniques : soit destruction en mai, soit laissé en place et tondu, soit laissé en place et entretenu par roulage », indique-t-elle. Le mélange comporte des espèces annuelles à cycle court (avoine/orge, vesce/féverole/radis) de façon à être « neutre » vis-à-vis de l’eau et de l’azote au moment de la floraison de la vigne.

Meilleure infiltration de l’eau

Les premiers résultats montrent l’intérêt de l’implantation des couverts, avec une amélioration de la vitesse d’infiltration de l’eau dans le sol sur le long terme. « Par rapport à un sol travaillé, au départ l’eau s’infiltre un peu moins vite dans les modalités avec couverts, mais après, en fin de saison, au mois d’août, l’eau pénètre mieux dans ces modalités. C’est intéressant par rapport à l’érosion, mais pas seulement, car souvent lors des orages de fin août, on doit attendre quatre jours pour vendanger avec des vignes au sol travaillé. Avec des couverts, il est possible de passer tout de suite. Même chose pour les traitements. » L’aspect MO est par ailleurs étudié, mais les résultats ne sont pour l’instant pas concluants.

« En contexte méditerranéen, l’important pour nous est d’avoir un couvert qui pousse à contre-saison avec la vigne. Le mot d’ordre est donc de semer tôt pour lever tôt afin d'être sûr de capter les pluies », estime-t-elle. Pour les viticulteurs souhaitant se lancer dans les couverts, elle conseille aussi d’augmenter la dose de semis préconisée.

L'implantation des couverts suivis par l'ICV améliore la vitesse d’infiltration de l’eau dans le sol sur le long terme.  Photo : ICV Provence
Détruire ou garder ?

« L’idéal est de semer fin août pour produire rapidement de la biomasse avant le froid de l’hiver, et pour que le couvert soit déjà important lorsque la vigne va redémarrer. » À ce moment-là, deux solutions sont possibles : détruire le couvert en cas de risque de gelée ou pour éviter la concurrence hydrique et azotée. « L’autre solution, plus intéressante, est de conserver le couvert, mais il est important de le gérer, d’où nos essais pour comparer roulage et broyage. Pour l’instant, nos résultats sont plutôt en faveur du broyage », précise-t-elle.

 

Couvert permanent : les trèfles à l’essai dans l’Hérault
Peu concurrentiels sur l'azote et l'eau, les mélanges de trèfles semblent très intéressants en contexte méditerranéen. Photo : Semences de Provence
Pour les domaines sous irrigation, la pratique des couverts est intéressante. Thomas Gautier, consultant viticole à l’ICV, suit un domaine en irrigation dans l’Hérault, qui implante des couverts depuis deux ans.
« Les mélanges de trèfles sont très intéressants en contexte méditerranéen : ce style de couverts, notamment les trèfles souterrains, s’avère peu concurrentiel au niveau azote, et dessèche naturellement dès que la contrainte hydrique apparaît, puis reverdit à l’automne, lorsque les pluies reviennent. Il ne concurrence ainsi pas la vigne et peut être conservé en couvert permanent, explique-t-il. Il ne produit pas une forte biomasse, mais participe à la vie du sol, fixe l’eau, limite l’érosion, améliore la texture et l’infiltration dans les sols. Autre atout de l’utilisation du trèfle : la facilité d’entretien, ce sont des couverts bas, ne nécessitant pas forcément d’être tondus. La difficulté en revanche, c’est leur implantation qui peut être difficile. Il faut avoir bien détruit l’enherbement naturel, semer le trèfle au bon moment, et surtout surdoser la quantité de graines à semer. Attention aussi aux printemps secs. À ce moment-là, la vigne et les sols ont besoin d’eau et le trèfle n’a pas encore séché, c’est à ce moment qu’il peut être “trop” concurrent. Si on a l’irrigation, ça peut être le moment de l’utiliser, sinon il faut envisager de détruire le couvert. »

 

Guide Civam66 : piloter des couverts végétaux en conditions méditerranéennes
En 2023, le CivamBio66 a produit une plaquette de synthèse sur les essais menés par le GIEE les Couvreurs de Vigne depuis quatre ans. Il est accessible en ligne gratuitement.
Parmi les questions abordées :
• 1 - Mes sols sont-ils prêts à recevoir un couvert ?
• 2 - Quel type de couvert pour quel objectif ?
• 3 - Quelles espèces choisir pour le semis ?
• 4 - Mes couverts améliorent-ils vraiment l’humidité de mon sol ?
• 5 - Quelles règles de pilotage pour la destruction de mes couverts ?
• 6 - Les biomasses produites peuvent-elles impacter la M.O. de mon sol ?
« L’expérience montre qu’il est préférable de semer tôt (fin août à mi-septembre) afin de profiter de la chaleur des sols et des premières pluies d’automne, afin d’avoir les sols déjà couverts pour les premiers gros épisodes méditerranéens. Le couvert se développera très peu de mi-novembre à fin janvier, du fait des faibles températures, et surtout de la réduction de la durée du cycle lumineux », indique le GIEE.

Cycle des espèces observées sur les parcelles du GIEE. Photo : Civam66

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