À quoi ressemblera la cave du futur ?

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La cave du futur sera connectée et tournée vers les problématiques environnementales. C’est le point de vue de Jean-Michel Desseigne, responsable des projets de recherche sur les procédés physiques, la conception et l’automatisation des équipements de cave, à l’IFV.

Selon vous, quelles vont être les grandes évolutions des caves de vinification dans les années à venir ?
Jean-Michel Desseigne  
: Globalement, les innovations s’orientent vers deux problématiques  : la qualité des produits et les alternatives au SO2. Prochainement, nous aurons plus d’instrumentation, avec le développement des capteurs, plus de connectique, d’assistance et de maintenance à distance, ainsi que de nouveaux procédés physiques.

Ces outils répondent aussi à de nouveaux enjeux…
J-M. D.  :
En effet, je pense qu’il y aura beaucoup plus d’intégration des aspects environnementaux dans les caves. Cela va dans le sens de la demande sociétale en général. Les problématiques d’énergie, d’eau, de bilans carbone et, dans la même optique, la valorisation des sous-produits vont guider les innovations. Il est assez difficile de prévoir le futur, mais je pense que nous allons vers des outils qui, à la fois, respecteront le produit, seront abordables financièrement et apporteront un plus par rapport à l’existant, notamment sur les aspects environnementaux et sur la maîtrise du SO2.

L’instrumentation commence à apparaître dans certaines caves. Pensez-vous que son utilisation se généralisera dans la cave du futur ?
J-M. D.  :
De par l’utilisation de capteurs, il est certain que nous sommes en train d’aller vers plus d’instrumentation dans les caves. Et ce n’est que le début. Il existe aujourd’hui des capteurs qui, à partir de mesures indirectes, permettent de suivre l’évolution de la qualité du produit, comme l’avancement des fermentations. Nous savons suivre la turbidité, la conductivité ou le pH. Mais l’offre est encore trop limitée car il est compliqué de trouver un capteur fournissant une information fiable au niveau analytique.

Des caves ultra-connectées : le nombre de données et d’informations va augmenter dans le futur. Manon Mouly
Ces problématiques font donc l’objet de projets de recherche ?
J-M. D.  
: Oui, des études sont en cours, elles devraient permettre de faire évoluer les applications de ces capteurs. On peut imaginer que, demain, ceux-ci nous aideront à évaluer les besoins en oxygène d’un vin, ou à savoir s’il est stable microbiologiquement. Actuellement, cela n’existe pas.

La connectivité est une tendance générale dans l’évolution de la société. Quelles sont son application et son utilité en cave ?
J-M. D.  :
Dans certaines caves, des pressoirs, des filtres ou des pompes sont déjà reliés à des téléphones. Ils communiquent de l’outil vers l’utilisateur où qu’il soit, en temps réel, sur l’avancement du procédé. Pour l’opérateur, l’avantage de la communication de ces équipements est l’optimisation et la gestion des flux de production. Cela va se déployer dans les années à venir.

Tous ces outils génèrent de nombreuses données et facilitent leur transmission. Peuvent-ils conduire à d’autres innovations ?
J-M. D.  :
Avec l’évolution de la connectivité, nous allons générer beaucoup d’informations qui vont remonter aux opérateurs, mais aussi aux équipementiers ou à d’autres structures. Les données pourront être captées et traitées très rapidement. Il sera possible de connaître très tôt la manière dont se comporte un millésime, en matière de pressurage par exemple. Il sera également possible de traiter des problèmes ou de réaliser un diagnostic à distance sur un programme ou sur un outil. Aujourd’hui, nous ne sommes qu’au tout début de la connectique en cave. Pour l’avenir, nous pouvons imaginer un réseau de capteurs et des machines capables de communiquer entre elles.

L’assistance et la maintenance à distance existent déjà dans les caves…
J-M. D.  :
Et notamment sur les chaînes d’embouteillage ou sur des filtres tangentiels. Avec le développement des nouvelles technologies et la diminution de leurs coûts, ces outils pourront intéresser un plus grand nombre de personnes.

De nouveaux procédés physiques sont en réflexion : quels sont les projets de recherche les plus prometteurs, et pour quelles applications ?
J-M. D.  :
De nombreux travaux sont en cours concernant les procédés physiques avec l’objectif d’améliorer l’extraction des composés phénoliques et la stabilité microbiologiques des vins, notamment dans la perspective de trouver une alternative au SO2. Nous travaillons notamment sur les champs électriques pulsés, les UV et les ultrasons. Certains d’entre eux sont en phase de validation au niveau de l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) et pourraient arriver en cave dans un futur proche. D’autres sont encore à l’état d’expérimentation.

Toutes ces innovations risquent-elles d’impacter la nature des métiers de cave ?
J-M. D.  :
C’est certain et c’est même déjà le cas actuellement, avec l’automatisation des chaînes d’embouteillage par exemple. Le métier d’embouteilleur a été totalement bouleversé. Pour certaines opérations, comme le décuvage, les équipementiers développent des robots car il n’y a plus grand monde qui souhaite décuver du gros matériel. À terme, les métiers vont changer ; il n’y aura peut-être plus de suivi de densité, mais il y aura d’autres pratiques de tâches.

Ces outils, en modifiant le travail de vinification, pourraient-ils avoir des conséquences sur les profils des vins ?
J-M. D.  :
Les procédés et les équipements favorisent un certain profil de vin. C’est le cas, nous l’avons vu, avec le développement des macérations préfermentaire à chaud par exemple. Mais l’objectif de ces innovations n’est pas que la cave impacte le profil des vins, mais plutôt de lui permettre de disposer d’un matériel adapté au profil qu’elle souhaite élaborer.

Article paru dans Viti Les Enjeux 32 de mai 2020

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