« Nous sentons un regain d’intérêt pour les porte-greffe »

Élisa Marguerit. Photo : Bordeaux sciences agro

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Enseignant-chercheur à Bordeaux sciences agro, Elisa Marguerit fait partie de l’équipe qui conduit le projet Greffadapt sur le site de l’Inra de Bordeaux. Une équipe qui doit composer avec le temps nécessairement long qu’induit le travail sur une plante pérenne.

Pourquoi si peu d’intérêt pour les porte-greffe ?
Élisa Marguerit :
Le porte-greffe, c’est un peu une boîte noire. C’est la partie souterraine de la plante, la moins visible et donc, peut-être, celle qui suscite le moins d’intérêt. Il n’est pas sous les feux de la rampe dans les médias et les recherches ont été moins soutenues financièrement que pour les cépages. Ici, à Bordeaux nous sommes une quinzaine de personnes à travailler sur les porte-greffe, dont seulement cinq sur la sélection. Ailleurs aussi, les équipes sont peu nombreuses : nous échangeons avec cinq pays, peut-être six.
Malgré tout, le travail sur les porte-greffe ne s’est jamais arrêté, mais c’est un travail de longue haleine. La vigne est une plante pérenne, avec un cycle très long. Par exemple, sur certains croisements effectués il y a trois ans, nous n’avons toujours pas pu obtenir de plantules. Il faut aussi prendre en compte le côté pratique qui, parfois, nous limite. Difficile de mettre en place un essai qui nécessite 600 mètres de bois lorsque l’on n’a que trois pieds dans les collections, qui produisent 10 mètres chaque année, s’ils sont en forme !

Je ne conseille pas de planter franc de pied, car le phylloxera est toujours bien présent. On voit régulièrement des symptômes sur les feuilles de repousses de porte-greffe.

Aujourd’hui, les recherches ont repris, notamment avec le projet Greffadapt. Que peut-on espérer ? À quelle échéance ?
É. M. :
Pour aller plus vite, nous réalisons des essais en serre et nous vérifions en parallèle les comportements dans une parcelle. Il faut bien voir que nous n’avons qu’une année de résultats sur l’essai en serre et que les plants en parcelle n’ont pas encore trois ans. Or il faut sept à huit ans pour obtenir un système racinaire adulte. La première possibilité sera sans doute d’inscrire un porte-greffe déjà inscrit à l’étranger, si nous pouvons accélérer la procédure en utilisant des données acquises dans le pays d’origine et dans nos essais. Nous savons déjà que trois porte-greffe sont plus tolérants à la sécheresse : le 110 R, le 140 Ruggieri et le 1103 Paulsen. Or les premiers résultats nous laissent penser que ces trois variétés développent des mécanismes différents de tolérance, ce qui suppose une complexité élevée pour localiser les zones responsables dans le génome.

Les porte-greffe utilisés actuellement sont issus de plusieurs croisements avec des Vitis d’origine américaine. Parmi ces Vitis, le berlandieri est connu pour être tolérant au calcaire, mais il s’enracine difficilement.

Pensez-vous que l’on puisse se passer de porte-greffe un jour ?
É. M. :
Personnellement, je n’y crois pas en France, à part dans quelques sols très sableux. Je n’encourage pas à planter franc de pied. Car, on le voit en pratique, les jeunes pieds issus de marcottage ne survivent pas plus de cinq à dix ans dans les meilleurs cas.
Ce qui ne semble pas très rentable économiquement. Le phylloxera est toujours présent, on voit régulièrement des symptômes sur les feuilles des repousses de porte-greffe.

 

Pour aller plus loin : Sept porte-greffe jamais inscrits tentent leur chance

Article paru dans Viti Leaders n°423 de mars 2017

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