Sage transformation de la filière vin en Afrique du Sud

Vignoble en Afrique du Sud. Photos : DR

[Version en français. Pour consulter la version en anglais, cliquer ici.]

 

De retour de notre voyage en Afrique du Sud avec le Master OIV MSc in Wine Management, voici nos constatations. Alors que des rapports officiels et autres documentaires1 dénoncent les conditions de vie et de travail des ouvriers dans les vignes, des centaines de Sud-Africains se démènent pour une transformation du secteur. Ce dernier panse encore les plaies du lourd passé de l’apartheid et peine à étouffer des réminiscences telles que les manifestations violentes qui éclatèrent encore il y a moins de cinq ans. Cependant, professionnels et institutions du secteur sont déterminés à rétablir cette situation. 

Comment expliquer une telle difficulté à se relever ?

La filière peine à asseoir sa rentabilité et certaines formes d’inégalités et de tensions sociales persistent. Dans un article récent2, Jonathan Steyn, diplômé du OIV MSc Wine Management, et responsable de la formation Business of Wine à l’Université de Cape Town indique : "bien qu’elle détienne un fort potentiel pour stimuler l’économie locale, [elle] nécessite de trouver des solutions pour générer plus de valeur – et vite."

L’Afrique du Sud est le 8e producteur mondial de vin avec 4,1 % du volume global total. L’importante majorité de sa production, 60 %, part à l’export, en particulier vers l’UE et le Royame-Uni… en vrac pour la plupart. La volatilité de la monnaie et les importants taux de change ne rentabilisent pas parfaitement ce choix de commercialisation. Un axe de transformation serait de vitaliser le marché local en augmentant la consommation de manière raisonnée. Celle-ci plafonnant actuellement à 6 l per capita. Parallèlement la valorisation passerait par des ventes plus conditionnées et moins de vrac.

Vers une image plus qualitative

D’après Jancis Robinson, "l’Afrique du Sud produit des vins blancs grandioses, uniques et sous-évalués, peu de gens semblent en être conscients". En effet, ces derniers représentent 54 % de la production et le Chenin Blanc couvre près de 20 % des 98 600 ha de surface totale plantée. Aussi, le pays peut se vanter de la plus importante surface mondiale dédiée à ce cépage, star montan te en qualité comme en notoriété. Toutefois, les écarts de valeur sont tels que pour des vins de même niveau, 90 points par exemple, les Sudafricains affichent moitié prix voire moins encore que leurs homologues français ou italiens ! La construction d’une image plus qualitative est l’enjeu relevé notamment par l’institut WOSA, Wines of South Africa (SA), chargé du marketing et de la communication de la filière à l’étranger. En effet, c’est l’un des piliers de son programme de transformation.

Unis par le projet WISE - « sage » en anglais

D’après Cristo Conradie, porte-parole des producteurs de la filière vinicole chez VinPro, "le retour sur investissement du secteur n’excède pas les 2 %". En d’autres termes, il peine à générer le moindre profit. "Pour que le secteur soit profitable et robuste, il faudra atteindre les 5"% en 2025."  VinPro est un organisme qui représente 3 500 producteurs de raisin et de vin. C’est un acteur prépondérant dans la lutte pour l’équité et la protection des droits des professionnels. Son équivalent pour les industriels ou distributeurs du secteur est SALBA - SA Liquor & Brandowners’ Association. Ensemble ils sont à l’initiative d’un projet collaboratif d’ampleur sectorielle nommé WISE - Wine Industry Strategic Exercise. Ce projet fixe les objectifs pour un avenir plus adaptable, concurrentiel et rentable. L’un des défis à venir est de convaincre le gouvernement de s’impliquer davantage car le projet est actuellement auto-financé à plus de 80 %.

Trois unités interagissent également avec VinPro et SALBA pour la mise en place du Projet de transformation3 dans une initiative globale d’amélioration du secteur. Chacune a un champ d’action spécifique :

  • Winetech se charge de la recherche, de la transmission et de l’enseignement des nouvelles technologies ;
  • Sawis rassemble et propage informations et statistiques et coordonne le système d’indication géographique Wine of Origin ;
  • Wosa, Wines of South Africa, est responsable de la communication à l’international. 

 

Évolution éthique vers une croissance intégrée

Avec THANDI en 2003, l’Afrique du Sud est devenue le premier producteur de vin accrédité du label FAIRTRADE. Elle est aujourd’hui le principal avec 66 % du volume mondial. Elle a également établi sa propre entité d’accréditation éthique depuis 2002 : WIETA -The Wine Industry Ethical Trade Association. C’est un acteur majeur de la protection des droits des travailleurs qui multipliera d’ici 2025 ses audits afin de couvrir la totalité du volume national produit au lieu de 48% seulement aujourd’hui. Actuellement, 45 000 ouvriers viti-vinicole sont employés par des producteurs accrédités et ce chiffre sera également amené à augmenter.

L’éthique passe aussi par un accès équitable au travail et à la propriété. En dépit des 44 projets actuels pour l’émancipation économique des communautés noires : BEE - Black Economic Empowerment, moins de 40 marques de vin et seulement 2 % du vignoble leur appartient. Les objectifs du projet WISE sont d’élever cette proportion à 20 % pour 2025. Ces communautés représentent tout de même 90 % de la population.

Des initiatives individuelles ouvrent la voie depuis longtemps. Chez FAIRVALLEY, Charles Back a transféré 60 % de son entreprise à ses ouvriers dès les années 1990 et leur a permis de construire habitations et écoles sur ses terrains. David Sonnenberg déclencha l’émancipation de 35 employés chez THOKOZANI dès 2007 en les faisant participer à une communauté équitable. BOSMAN, un autre pionnier, représente à ce jour la plus grande entreprise BEE du milieu du vin.

 

L’éducation, pilier de l’émancipation

De la crèche à l’université, de nombreux organismes soutiennent les populations et transmettent aux jeunes générations des valeurs éthiques :

  • PEBBLES PROJECT accompagne les familles de communautés agricoles et viticoles dans leur éducation, nutrition, santé et sécurité ;
  • PYDA (Pinotage Youth Develoment Academy) prépare des jeunes de 18 à 25 ans pour trouver un emploi dans les secteurs du vin, du tourisme et du réceptif ;
  • le département viticulture et œnologie de l’université de Stellenbosch et la Business School de l’université de Cape Town forment les futurs cadres de la filière.

Ils inculquent aux jeunes générations la compréhension, la consommation raisonnée et la juste considération du monde du vin, ainsi que des opportunités qui lui sont inhérentes.

 

La sagesse et la patience constituent parfois les meilleurs alliés d’une transformation active. Ne dit-on pas aussi des grands vins que : plus les ambitions sont grandes, plus le processus est long ?

Marie-Céline Wallerand & Marie Amiot

Étudiantes OIV MSc in Wine Management P29

Avec tous nos remerciements pour Jonathan Steyn

(1)  Rapport 2011 Human Rights Watch, Rapport 2015 ILO et Documentaire 2016 Tom Heinemann : Bitter Grapes.

(2) Article de Jonathan STEYN pour Business Day, 03/2017 A troubled legacy keeps shackles on wine sectorhttps://www.businesslive.co.za/bd/opinion/2017-03-28-a-troubled-legacy-keeps-shackles-on-wine-sector/

(3) Taking Transformation Forward : http://capewine.org/Transformation/flipviewerxpress.html

 

Des domaines à connaître:

BLACK OWNED BRANDS

FAIRTRADE WINERIES

WIETA WINERIES

La sagesse des femmes… à visionner !

Unathi MATSHONGO, VinPro Transformation & Development Office

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Ntsiki BIYELA, première femme winemaker d’Afrique du Sud en 2004 chez STELLEKAYA. Elle a créé sa marque cette année ALSINA

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Andisiwe KETSIWE, étudiante à PYDA
 

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