Situé dans l’Entre-deux-Mers à Ruch, à quelques kilomètres de la Dordogne, ce domaine, conduit en biodynamie, a fait le choix de vinifier une partie de ses raisins et de vendre le reste sur pied. Sylvain et Kim Destrieux diversifient ainsi leurs revenus tout en se dégageant le temps nécessaire pour travailler dans de bonnes conditions.
Au Clos de la Molénie, le maître-mot est « diversité ». Et cela commence dans le vignoble où neuf cépages sont cultivés en bio et en biodynamie sur 25 hectares de sol argilo-calcaire. Merlot, cabernet franc, malbec, cabernet sauvignon et castets pour les rouges. Sauvignon blanc, sauvignon gris, sémillon et petit manseng pour les blancs. « On croit beaucoup à la diversité des cépages, d’autant plus avec l’année qu’on a eue, confie Sylvain Destrieux, rencontré deux jours après la fin des vendanges. C’est surtout le merlot qui a été touché par le mildiou, mais on a quand même réussi à ramasser un bon demi-rendement. »
Sur ces 25 hectares, seulement un tiers est vinifié par le vigneron et son épouse Kim Destrieux. Le reste est vendu sur pied en vendanges fraîches ou à travers des conventions de mise à disposition (voir encadré). Les clients sont des négociants vinificateurs, des domaines souhaitant diversifier leur gamme, des vignerons victimes d'aléas climatiques, ainsi qu’une brasserie produisant de la vière, une boisson faite à partir de bière et de vin. « Cela nous permet d’alimenter notre trésorerie plus rapidement que l’activité vinicole, apprécie celui qui a créé l’exploitation en 2020 en s’associant à son épouse. Mais ce n’est pas évident d’attribuer les parcelles, ni d’estimer les vendanges. »
Cette année, l’incertitude qu’a fait peser le mildiou a empêché le couple de démarcher de nouveaux clients. La première année, erreur de débutant, trop de raisins sur pied ont été vendus, et il n’en est pas resté assez pour atteindre l’objectif de 35 000 bouteilles. Embêtant, mais pas de quoi remettre en question un modèle que Sylvain Destrieux a mûrement réfléchi, riche de ses expériences précédentes.
35 000 bouteilles par an
« L’avantage, à 40 ans, c’est qu’on sait bien mieux ce qu’on veut faire et ce qu’on peut faire qu’à 25 ans », sourit-il. Fils et petit-fils de viticulteurs, le vigneron a travaillé une dizaine d’années au Château Mangot, un saint-émilion grand cru, puis aux côtés de son père et de son frère en tant qu’adhérents de la cave coopérative locale. L’exploitation de 45 hectares passe en bio en 2015, mais la cave ne manifeste pas d’intérêt pour la démarche. Sylvain Destrieux décide alors de prendre son envol – et les 25 hectares qui lui appartiennent – et de créer avec son épouse leur propre domaine.
« Nous avons voulu avoir plein de possibilités techniques parce que nous sommes en Demeter, ce qui limite les possibilités lors de la vinification », explique Sylvain Destrieux, qui aime récolter des raisins bien mûrs et les vinifier en grappes entières. Pas de levures, pas de nutriments, pas d’enzymes, pas de copeaux, pas de thermovinification, mais un arsenal de cuves qui permet de s’adapter aux raisins. La méthode, aussi créative qu’elle soit, demande « beaucoup de surveillance et d’anticipation des problèmes ».
Appellations bordeaux et vin-de-france
À l’arrivée, la production du Clos de la Molénie se partage en volume à 2/3 en appellation bordeaux et à 1/3 en vin-de-france. En valeur, la répartition est équivalente, à 60/40. « Notre gamme classique en appellation bordeaux est notre entrée de gamme, tandis que nos cuvées atypiques en vin-de-france sont notre haut de gamme », précise Sylvain Destrieux. Les premiers sont vendus entre 8 € et 15 € la bouteille (prix consommateur). Quant aux seconds, ils le sont entre 15 € et 25 € la bouteille.
Pour ce qui est de la commercialisation, le domaine travaille avec des négociants bordelais et échange avec des agents afin d’être représenté dans d’autres régions. Il exporte également aux Pays-Bas, au Danemark et au Canada. « Nos ventes augmentent, mais il faut de plus en plus d’énergie pour vendre, et le temps nécessaire pour commercialiser s’allonge, avoue le vigneron. Il y a beaucoup d’attentisme. D’où l’intérêt d’avoir une distribution diversifiée. »
• Création : 2020
• Surface : 25 hectares
• Encépagement en rouge : merlot (62 %), cabernet sauvignon (15 %), cabernet franc, malbec (6 %), castets (2 %)
• Encépagement en blanc : sauvignon blanc (70 %), petit manseng (20 %), sémillon (10 %)
• Vente de raisins sur pied : 2/3 de la production
• Production : 35 000 bouteilles par an
• Prix public : entre 8 et 15 € la bouteille en AOC bordeaux, entre 15 € et 25 € la bouteille en vin-de-france
• Équipe : deux associés (Sylvain et Kim Destrieux) et deux apprentis
Encadrée par la Safer, la convention de mise à disposition est une forme de location des vignes limitée à la durée des vendanges. La propriété qui récolte peut alors mettre le nom de son château sur les raisins comme si elle les avait produits. Ce dispositif sert notamment aux viticulteurs qui ont perdu une partie de leur vendange à la suite d’épisodes de gel ou de grêle.
