Les fontaines à vin sont-elles un phénomène durable ?

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La tendance vrac des légumineuses débutée dans les épiceries bio s’est étendue au vin et à les GMS. Est-ce une mode ou une forme de distribution pérenne, et est-ce intéressant pour les vignerons et/ou caves coopératives ?

Au début, il y avait le sucre et les légumineuses. Puis les gammes se sont élargies. Toutes les épiceries bio possédaient leurs distributeurs de vrac de nourriture, puis de lessives et d’huiles, voire de moutarde et de vinaigre. La grande distribution a fini par s’y mettre, avec un peu de décalage. Après la première vague de nourriture, est arrivée celle du vin en vrac. Une nouveauté ou un retour vers le passé ? En effet, nos grands-pères allaient au domaine avec leur cubi de 5 ou 10 litres pour faire le plein de leur vin quotidien. Et aussi discuter avec leur vigneron préféré !

La fontaine à vins Tank It Up permet un accès aux vins  en libre-service. Photo : I.Aubert/Pixel6TM
L’époque est révolue, on boit moins et de façon plus occasionnelle. Mais la tendance est à la consommation éthique. « L’achat en vrac s’inscrit dans un mouvement de fond de consommation plus responsable. Nul doute que le potentiel est considérable… », affirme Catherine Urvoy, experte consommateurs chez Nielsen, dans une étude indiquant que plus d’un tiers des foyers achetaient du vrac en 2018 (en dehors des fruits et légumes).

Atout bilan carbone

La réduction du bilan carbone est un atout communication pour les viticulteurs, pour les caves coopératives et pour les propriétés. Et les clients. Les bouteilles en verre peuvent être recyclées, mais leur transport pèse plus lourd en bilan carbone qu’une caisse-outre. Pour le consommateur final, soucieux de l’environnement et de son porte-monnaie, la solution fontaine à vins est intéressante. Et les opérateurs qui proposent ce type de système peuvent apposer une étiquette « produit local » qui plaît aux acheteurs, car ce sont majoritairement des références issues de régions proches géographiquement. Le vin en vrac représente aussi un atout en matière de logistique pour le magasin et pour le vigneron : économie de transport, approvisionnement rapide et intermédiaire supprimé. Les fontaines à vins se développent lentement. Par exemple, l’entreprise lilloise, Jean Bouteille, née en 2014, est présente dans 40 points de vente concernant l’univers vins, tous types de magasins confondus : GMS, épiceries vrac, magasins bio spécialisés, magasins de proximité. Parmi ses clients partenaires figurent Franprix, Biocoop, Système U, Leclerc, Casino. Les fournisseurs de systèmes de distribution de vin en vrac travaillent différemment. Si, par exemple, l’entreprise J3D fournit le meuble fontaine, l’entreprise Jean Bouteille, de son côté, fournit non seulement le meuble, mais propose également un catalogue de références en vins blanc, rouge et rosé.

Jean Bouteille : « Nous proposons aussi les vins »
L’entreprise Jean Bouteille vient de lancer une fontaine appelée Gravity qui permet de proposer tous les liquides alimentaires, vins compris. Les enseignes peuvent l’acheter ou la louer. Photo : J. Bouteille
La solution fontaine se décline aussi avec la possibilité de fournir le vin.
« Nous proposons au catalogue : quatre vins blancs, deux rosés, trois vins rouges. L’ensemble du catalogue proposé concerne des produits biologiques, il s’agit de vins de cépages », explique Manon Carpentier, de Jean Bouteille. Actuellement, les vins au catalogue sont des merlots, chardonnays et sauvignons provenant du Languedoc et du Bordelais. Mais l’entreprise effectue une refonte de son catalogue pour diversifier son offre, l’adapter à la région de la clientèle, et proposer des produits en enseignes spécialisées bio et vrac, et une gamme bio GMS. Aussi, l’entreprise recherche de nouveau producteurs.
Les personnes intéressées peuvent contacter la société sur l’e-mail suivant  : contact@jeanbouteille.fr

Des régions plus intéressées que d’autres

« Le vrac fonctionne mieux en zones rurales », affirme Astrid Tarzian, créatrice de Tank It Up, un distributeur de produits liquides. De son côté, Manon Carpentier, chez Jean Bouteille, confie que les zones sur lesquelles les ventes de vin en fontaine qui fonctionnent le mieux sont : « Le sud de la France, la Bretagne et Paris. » Le concept ne fonctionne pas partout en effet. À la biocoop de Saint-Vincent-de-Tyrosse (Landes), par exemple, la fontaine prévue pour le vin a été recyclée pour les lessives : il n’y avait pas assez de rotations.

Du côté de la biocoop de Lyon Croix-Rousse, les volumes ne sont pas aussi importants qu’en grande distribution, mais les clients apprécient. « On passe entre 10 et 20 litres par mois environ. Les clients nous demandent de leur montrer comment cela fonctionne pour leur premier achat. Ensuite, ils se servent tout seuls. Ce sont des vins locaux et les gens apprécient cet aspect proximité », explique Pierre Canese, responsable du vrac pour le magasin. Sur la machine, on peut lire clairement le vin, la dénomination, les degrés d’alcool, le(s) cépage(s) et le prix au litre. C’est rassurant pour le consommateur.

Diversification et clientèle différente

Rémi Weinreich du domaine Giniès, dans la Drôme, explique : « Lorsque nous avons agrandi l’exploitation, nous avons pu faire plus de volumes et donc faire des caisses-outres. Nous sommes vendus dans les fontaines vrac dans plusieurs biocoop de Rhône-Alpes. » Pour lui, comme il n’y a pas d’intermédiaire, vendre par ce biais est intéressant, même si les marges ne sont pas très élevées. Les ventes caisse-outre pour les fontaines biocoop représentent environ 25  hl par an, soit 90  % de ses ventes de ce contenant. Autre atout : « Cela nous permet de toucher des clients différents qui vont acheter leur vin pour la semaine. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui vont acheter des bouteilles », explique Rémi Weinreich. En somme, ses côtes-du-rhône rouge, bio, vendus aux consommateurs 5,57  € le litre (en format caisse-outre de 10 l) à la fontaine à vins de la biocoop de Lyon 4 ou de Grenoble, sont des ventes supplémentaires qui ne viennent pas faire de l’ombre à ses vins embouteillés.

En caves coopératives aussi

« Les caisses-outres sont faciles à mettre en place », explique  Pierre Canese, responsable vrac de la biocoop lyonnaise. Photo : DR
L’entreprise beaujolaise Tank It Up a été créée par une amoureuse des vins de sa région. Ex-commerciale pour un grand groupe alimentaire, Astrid Terzian est devenue négociante en vin et a imaginé des fontaines à vins, il y a dix ans, alors qu’elle faisait des courses en grande distribution. Son premier distributeur de vin en vrac, Tank It Up, est commercialisé au Cora de Dunkerque en 2011. Le système se perfectionne pour s’adapter aux demandes les plus courantes : une fontaine trois références (généralement trois couleurs). Et aussi pour proposer des meubles et des caisses-outres aux tailles variables.

Ses Tank It Up sont présents dans une quinzaine de Leclerc en France, dans un Cora et dans un Auchan. « À Firminy (Loire), ils font 700 litres par mois. Il y a des clients réguliers qui viennent pour le vrac. Il y a une fidélisation de la clientèle », rapporte Astrid Terzian. Son Tank It Up est aussi présent dans une cave coopérative : celle de Cruet, en Savoie. Elle rapporte que 500 litres environ sont commercialisés par mois grâce à cette fontaine. Si le retour à la tradition permet de booster les ventes de vrac, la tradition a du bon !

Article paru dans Viti 450 d

e mars 2020

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