Le biocontrôle au vignoble, c’est pour maintenant ?

Diffuseur Rak dans les vignes

Un diffuseur Rak dans les vignes.

Crédit photo Minolta DSC
Face à la demande sociétale, le contexte est propice au développement des produits de biocontrôle en viticulture. Attention toutefois, comme les molécules classiques, ces spécialités réclament du temps : du temps pour la R&D et du temps pour apprendre à en maîtriser l’utilisation sur le terrain.

Comment se fait-il qu’on ne soit pas capable d’arrêter tous les produits phytosanitaires pour les remplacer par du biocontrôle ? La demande de « dispositifs (phytosanitaires) naturels, et/ou sans dispersion dans le milieu de produits dangereux pour la santé et l’environnement », selon la définition de l’IBMA, se fait de plus en plus pressante. De la part de la société civile, mais aussi des agriculteurs.

Ça tombe bien : les ventes sont en croissance de 11 % sur 3 ans, il y a de plus en plus de substances mises sur le marché et le président de la République s’est dit favorable au développement du biocontrôle lors de son discours aux États généraux de l’alimentation. Incontestablement, on assiste à un alignement des planètes en faveur du biocontrôle. Et même si le biocontrôle existe aussi en grandes cultures, la viticulture, l’arboriculture et le maraîchage sont les plus concernés pour l’instant.

10 ans de R&D nécessaires

Comme pour les matières actives de synthèse, développer des produits de biocontrôle prend du temps. Pierre-Antoine Lardier, responsable du pôle cultures spéciales chez BASF Agro rappelle : « Chez BASF Agro, nous sommes acteurs du biocontrôle depuis la fin des années 1970 avec le soufre, bien avant que la dénomination biocontrôle n’apparaisse. Et nous sommes longtemps restés seuls sur ce marché avec la confusion sexuelle contre les vers de grappe. »

Commercialisés en 1993, d’abord en Champagne et dans le Bordelais, les Rak® ont vraiment trouvé leur clientèle depuis une douzaine d’années. Il se souvient : « Avec nos partenaires de l’Inra et de l’Agroscope de Changins en Suisse, nous avons tâtonné. Quelles sont les particularités du cycle reproducteur de cochylis et eudémis ? Quelle quantité de phéromones par diffuseur ? Combien de diffuseurs à l’hectare ? Comment protéger les phéromones des rayonnements UV ? Autant de questions résolues à force d’expérimentations longues et, forcément, coûteuses. »

Bref, en matière de biocontrôle, il faut investir beaucoup. La phase de R&D couvre la même durée que pour les molécules de synthèse, environ dix ans.

>>> Pierre-Antoine Lardier résume :

« On va plus vite en toxicologie, mais plus lentement en compréhension des modes d’action. Par ailleurs, ce qui fonctionne en laboratoire n’est pas forcément reproductible automatiquement sur le terrain. Dans nos boîtes de Petri, les nématodes "sautent" sur les ravageurs. À la vigne, il y a toujours quelque chose pour les détourner de leur mission… »

Sans compter les incertitudes liées aux conditions d’humidité, de luminosité, de température, etc.

Diffuseur Rak de BASF dans les vignes
Diffuseur Rak de BASF dans les vignes.
Crédit photo : BASF

Une utilisation en programme, en complément

Malgré ces difficultés, la recherche est fructueuse. Et la chasse aux tordeuses n’est pas la seule concernée. En effet, la plupart des produits de biocontrôle homologués actuellement interviennent en programme, en complément des matières actives, ce qui permet, entre autres, de réduire les IFT.

La spécialité Roméo®, par exemple, vient d’obtenir son autorisation de mise sur le marché.

>>> Béatrice Bacher, chef marché vigne, précise :

« Composée d’extraits de parois de levures Saccharomyces cerevisiae, ce produit de biocontrôle agit en stimulateur des défenses naturelles de la vigne contre le mildiou et l’oïdium. »

Il est parfois possible d’opérer une substitution, dans des situations spécifiques. En année de pression faible à moyenne, par exemple, les Rak® dispensent de recourir aux insecticides. Et si la pression est forte, un traitement en début de saison suffira le plus souvent. On peut très bien bâtir un programme anti-oïdium 100 % soufre, mais il faut alors se préparer à intervenir après chaque pluie pour garder le produit en contact sur le végétal, et ainsi combattre la maladie.

Le biocontrôle nécessite davantage de disponibilité

Le biocontrôle contribue à apporter une protection de bonne qualité, mais nécessite plus de disponibilité pour appliquer le produit et donc, souvent, plus de temps de travail pour traiter son vignoble, du fait de l’augmentation du nombre de passages.

>>> Anne Resweber, responsable biocontrôle pour BASF Agro, remarque :

« Les distributeurs ont un vrai rôle d’éducation à la bonne utilisation du biocontrôle, en insistant encore plus que d’habitude sur le stade d’application et sur la nécessité de l’observation au vignoble. Il est aussi possible de développer la complémentarité, bien réelle, entre les outils d’aide à la décision et le biocontrôle. »

Le développement de spécialités biocontrôle se poursuit

Dans les années à venir, BASF Agro va poursuivre le développement de spécialités de biocontrôle fongicides, afin de favoriser la viticulture durable. L’entreprise investit fortement dans la recherche, dans ses propres laboratoires ou en partenariat avec des start-up.

>>> Pierre-Antoine Lardier met en garde :

« Nous travaillons actuellement sur des bactéries de type Bacillus, contre le botrytis. Mais croire que l’on va passer, du jour au lendemain, du tout conventionnel au tout biocontrôle est illusoire. Cette transformation est possible, mais elle prendra du temps… Sauf à mettre en péril la rentabilité de toute la filière qui, aujourd’hui, est, juste après l’aéronautique, le 2e poste positif dans la balance commerciale française. »

Car nos voisins européens sont à l’affût. Il souligne que « les Italiens et les Espagnols disent qu’ils ne sont pas prêts à investir massivement dans le biocontrôle. Chez eux, la demande sociétale est loin d’être aussi forte qu’en France et leurs vins sont les premiers concurrents des nôtres ».


Béatrice Bacher, chef marché vigne

Expert BASF pour
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