Conseils pour contrôler la flore spontanée entre les rangs de vigne

Le couvert spontané restant en place plus d’un an entre les rangs de vigne est la solution la plus adaptée à vos objectifs technico-économiques. Des erreurs sont à éviter afin que la théorie soit en phase avec la pratique et pour permettre de ne pas sélectionner des plantes concurrentielles.

Lorsque que l’on arrête d’appliquer des désherbants entre les rangs, sans exception, des plantes se développent. Si ce phénomène est commun à toutes les situations, les espèces poussant de manière spontanée ainsi que la densité du couvert qu’elles génèrent vont varier d’une parcelle à l’autre.

Dans certains cas, les plantes pionnières majoritaires peuvent s’avérer concurrentielles pour la vigne. Dans d’autres cas, le couvert obtenu par pousse spontanée n’est tout simplement pas assez développé. La densité de la végétation est insuffisante pour avoir un impact positif sur la portance, l’érosion, la biodiversité… « Si l’option “couvert spontané” est la plus adaptée à vos objectifs agro-économiques, il peut être intéressant de passer par l’étape “engrais vert” plutôt que de s’obstiner à vouloir avoir, de suite, un couvert spontané dans ses vignes, suggère Éric Maille, conseiller agronomique pour AgroBio Périgord. Pendant deux ou trois ans, on sème des espèces adaptées à sa région et à son sol. Moutarde, avoine, seigle, phacélie, féverole, navette, colza fourrager… chacune a ses qualités et ses défauts. Implanté si possible à l’automne, l’engrais vert est détruit par broyage au printemps. Il va faire concurrence aux variétés spontanées concurrentielles pour la vigne et modifier progressivement la structure du sol, le rendant plus favorable au développement d’une flore naturelle variée et souvent moins compétitives pour les ressources hydrominérales. »

Bannir la tonte rase

Une fois le couvert naturel en place, des erreurs sont encore à éviter afin de tirer le meilleur de son enherbement entre les rangs. « Comme le désherbage chimique ou le travail du sol, la tonte/broyage est une perturbation. Elle entraîne une sélection dans les espèces végétales qui se développent entre les rangs. Selon ses pratiques et la manière dont on les met en œuvre, la sélection sera plus ou moins concurrentielle pour la vigne, explique Loreleï Boechat Cazenave, de la chambre d’agriculture de Gironde. La tonte favorise le développement d’espèces vivaces, car elle entraîne la destruction de la partie aérienne de la plante et ne perturbe pas la partie racinaire. Les vivaces peuvent facilement se régénérer par reproduction végétative (rhizomes, stolons), à l’inverse des plantes annuelles qui ne peuvent pas aller jusqu’à la grenaison. Ceci est d’autant plus vrai si la tonte est rase et fréquente. »

Quelques exemples d’espèces à reproduction végétatives ou en rosette, très concurrentielles pour la vigne, sélectionnées par une tonte rase et fréquente.

« Pour éviter cette situation, dans le vignoble périgourdin où les têtes de ceps sont hautes, je conseille de tondre avec une hauteur de coupe de 8-10 cm, voire 15 cm, indique Éric Maille. Autre point fondamental : la montée à graines. Les plantes doivent pouvoir atteindre ce stade au moins une fois dans l’année. » À cela au moins deux arguments. S’il n’y a pas de graines, il n’y a pas renouvellement des plantes annuelles que l’on souhaite voir proliférer. Par ailleurs, une plante est « programmée » pour se reproduire. Dans le cas des espèces à fleur, la plante va mobiliser de l’eau et des éléments minéraux puisés dans le sol pour faire sa fleur. Coupe après coupe, tant que la période est propice à la reproduction, elle va mobiliser de l’eau et des minéraux dont la vigne peut avoir besoin. Plus tôt elle fait sa fleur, plus longtemps la vigne pourra bénéficier des ressources du sol et moins il sera nécessaire de passer la tondeuse pour contenir le couvert.

« C’est la stratégie qui s’applique la plupart des années dans le vignoble périgourdin, estime Éric Maille. Mais en années pluvieuses, il peut être intéressant d’agir à l’inverse : tondre tôt et souvent, pour empêcher la floraison. Conduites ainsi, les plantes du couvert qui veulent fleurir vont pomper de l’eau et évacuer en partie le surplus du sol. »

« La gestion du couvert est à raisonner à l’année, à la parcelle et en fonction de ses objectifs, continue le conseiller. Il n’y a pas d’itinéraires standards, et pas de dogmes à respecter à tout prix. Ainsi, si une parcelle de vigne est “engazonnée” avec une dominance de graminées dans le couvert, il est peut-être plus raisonnable, plutôt que de modifier sa technique de tonte pour aboutir à une modification lente de la biodiversité du couvert spontané, de le détruire, de travailler son sol, de semer des engrais verts quelques années, puis de repartir (peut-être) sur un couvert spontané. »

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter les actes du colloque des Journées techniques vigne et vin bio, coorganisé par les Vignerons bio de Nouvelle-Aquitaine. www.vigneronsbionouvelleaquitaine.fr

Retrouvez aussi l'arbre de décision d'Eric Maille, d'AgroBio Périgord : est-ce le moment de tondre ?

Un essai à Bordeaux: couvert spontané ou engrais verts ?
Dans le Bordelais, la chambre d’agriculture de Gironde teste un itinéraire où il n’y a pas de choix à faire entre engrais verts et couvert spontané. Un rang sur deux, des engrais verts sont implantés chaque année, pendant trois ans. Sur les autres rangs, la flore naturelle est laissée. La fauche/tonte est tardive, avec une hauteur de coupe de 15 cm. Au bout de trois ans,
les rangs sont inversés. Les premiers résultats sont attendus pour 2020.

Article paru dans Viti 443 de mai-juin 2019 

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