La Cave de Lugny opte pour une cuvée vinifiée sans sulfite

PHOTOS : E.Thomas/Pixel Image

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La Cave de Lugny, située dans le Mâconnais a lancé une cuvée en blanc vinifiée sans soufre. Le Mâcon-Péronne en Chassigny correspond à une surface de 9 hectares, et concerne une dizaine de viticulteurs qui effectuent à la vigne le premier geste de ce nouvel itinéraire : l’ajout de levures de bioprotection.

La Cave de Lugny, implantée en Bourgogne a lancé pour le millésime 2016 une cuvée vinifiée sans soufre. Une cuvée en blanc. « Le but n’est pas de faire des vins natures, mais de s’inscrire dans la tendance globale de diminution des intrants, tout en gardant en tête les contraintes d’une cave coopérative, et le fait que nos vins blancs sont des vins de garde, destinés à être consommés sous 2-3 ans. On parle beaucoup des vins rouges sans sulfites, moins des blancs, je trouvais intéressant de le faire en blanc, sur un cépage comme le chardonnay. Nous avons choisi de faire une vinification sans SO2, puis de sulfiter après la FML », explique Grégoire Pissot, œnologue de la structure depuis 12 ans.

La Cave de Lugny comporte 199 adhérents. Pour ce premier essai, Grégoire Pissot a choisi un lieu-dit, le Mâcon-Péronne en Chassigny qui correspond à une surface de 9 hectares et qui concerne une dizaine de viticulteurs.

Des levures de bioprotection Torulaspora delbrueckii

« D’habitude, nous avons des itinéraires plutôt protecteurs vis-à-vis de l’oxygène pour les blancs – récoltés à la machine. Nous sulfitons dès la vendange. Le geste reste le même, mais cette fois ce sont des levures de bioprotection (Torulaspora delbrueckii) qui sont ajoutées à la benne, vont s’implanter rapidement dans le milieu, et limiter ainsi le développement de flores indésirables.

L’étiquetage des bouteilles de Mâcon-Péronne en Chassigny précise cette vinification particulière, avec un macaron portant la mention vinification sans SO2 sur l’étiquette, et une explication plus détaillée sur la contre-étiquette.

Le levain de bioprotection est préparé à la cave à la dose de 5 g/hl, une dose moyenne pour 3 tonnes de vendanges est amenée à la vigne en bidons de 10 litres. Les viticulteurs l’introduisent sur les raisins dans la remorque dès le vidage du premier bac de la machine à vendanger. Ces bidons, une fois utilisés, sont récupérés le soir dans un point de collecte prédéfini.

« Pour le millésime 2016, la cinétique de la FA était bonne, et la FML s’est naturellement enclenchée tout de suite, elle était terminée mi-décembre. Nous avons sulfité mi-janvier à 4 g/hl pour assurer la stabilité microbiologique. Je suis adepte des sulfitages décalés qui donnent, je trouve, des vins plus aboutis. Je le faisais de façon un peu empirique, mais avec les connaissances actuelles, une des explications serait que les bactéries lactiques consomment de l’éthanal, et elles diminuent donc l’impact négatif de ce composé. »

Après une réception sans ajout de SO2, l’itinéraire œnologique est ensuite identique aux pratiques usuelles à la cave : pressurage pneumatique, débourbage par flottation, ensemencement pour la FA avec une souche faiblement productrice de SO2. L’emploi de l’azote gazeux est systématisé à tous les niveaux de transfert. C’est une des raisons, avec le fait que l’hygiène du chai doit être irréprochable, qui permet de ne pas sulfiter durant la vinification et de maîtriser les différentes phases fermentaires et d’élevage.

La bioprotection permet de moins ajouter de SO2 à l’élevage, et à la mise, la teneur en SO2 total était de 55 mg/l contre 90 mg/l pour un vin embouteillé à la même époque et vinifié selon l’itinéraire habituel de la Cave.

« Je me suis rendu compte que l’équilibre SO2 libre/SO2 total ne bouge pas beaucoup dans le temps. Alors que sur un vin “classique” nous devons réajuster régulièrement le SO2 libre. De janvier à fin septembre, sur cette cuvée, la teneur en SO2 libre est restée stable à 24 mg/l. Sans rajout de SO2, nous sommes arrivés début octobre à 22 mg/l de SO2 après la mise en bouteille. Diminuer la dose de SO2 dès le départ permet d’en rajouter moins ultérieurement. »

Ce premier essai s’est révélé concluant, au niveau gustatif comme commercial. L’étiquetage des bouteilles précise cette vinification particulière, avec un macaron portant la mention vinification sans SO2 sur l’étiquette, et une explication plus détaillée sur la contre-étiquette. En 2017, la Cave a poursuivi cette première cuvée (580 hl vinifiés) et elle en a développé une seconde en blanc vinifié sans soufre.

Un domaine en bio avec dix-huit viticulteurs cogérants

« On parle beaucoup des vins rouges sans sulfites, moins des blancs, je trouvais intéressant de le faire en blanc, sur un cépage comme le chardonnay. Nous avons choisi de faire une vinification sans SO2, puis de sulfiter après la FML », explique Grégoire

« Nous avons décidé de créer un domaine en bio, le domaine de la Croix Salain. Aujourd’hui, la Cave de Lugny n’a aucun adhérent prêt à se lancer à 100 % en bio, mais plusieurs étaient intéressés pour une partie de leur production. Nous avons créé un GIEE, dix-huit viticulteurs cogérants ont mis à disposition une partie de leur parcellaire, pour une surface totale de 10 ha. 2017 est le premier millésime de l’engagement vers la conversion en bio, mais nous avons décidé de sortir déjà une cuvée sans sulfites ajoutés au niveau des vendanges (425 hl vinifiés) : Mâcon-Villages Domaine de la Croix Salain. L’accueil de la démarche globale par nos clients est excellent. Globalement, c’est une démarche intéressante, mais le jour où la vendange est altérée, je pense que la bioprotection ne suffira pas. Avec l’évolution climatique notée ces dernières années, nous aurions probablement plus souvent des soucis de sur-maturité plutôt que des problèmes de vendanges altérées. »

D’habitude, nous avons des itinéraires plutôt protecteurs vis-à-vis de l’oxygène pour les blancs – récoltés à la machine. Nous sulfitons dès la vendange. Le geste reste le même, mais cette foisce sont des levures de bioprotection (Torulaspora delbrueckii)qui sont ajoutées à la benne.Grégoire Pissot, Cave de Lugny

Le frein au développement de la technique sur davantage de volumes est la logistique. Préparer 200 bidons de 10 litres de levain par jour et les transporter…

« Le jour – et j’espère qu’il ne va pas tarder – où les fabricants proposeront des levains qui n’ont pas besoin d’être réhydratés, cela favorisera les itinéraires de vinification sans sulfites sur des structures comme les nôtres. Fondamentalement, cette vinification sans soufre n’a pas modifié le profil du vin. On note peut-être une ouverture aromatique plus précoce, plus intense, il ne reste plus qu’à observer comment ce vin se comporte au vieillissement », résume-t-il.

Article paru dans Viti Les Enjeux de mai 2018

Viti Les Enjeux mai 2018

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