L’appel du Nord

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La vente de vins au détail en Suède est réglementée. 90 % des vins sont vendus par Systembolaget, le monopole d’État, mais la restauration, le duty-free ou les clubs des vins peuvent être touchés en direct.

La Suède, ce n’est pas tout près (2 000 km de distance tout de même), mais ce marché mérite d’être pris en considération. Tout d’abord parce que la Suède fait partie des pays européens où la consommation est en hausse. Ensuite parce que le niveau de vie élevé - et le pouvoir d’achat - de ce pays nordique laisse espérer des ventes intéressantes en volume comme en valeur.

Et pour ne rien gâcher, les vins français y sont appréciés et bénéficient d’une bonne image.

La vente de vins au détail est réglementée en Suède. Plus de 90 % des vins passent par un monopole d’État, Systembolaget. Mais une partie des vins est également vendue en direct auprès des restaurateurs, ou via Internet ou par le duty-free. La restauration est une voie d’accès au marché en hausse régulière depuis quelques années.

Vendre ses vins en Suède se fait différemment selon le circuit. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de choisir : jouer la vente directe et les ventes par l’intermédiaire du monopole d’État est non seulement possible, mais recommandé. Le circuit de la restauration est notamment intéressant, d’autant qu’il cherche à se démarquer des ventes du monopole, avec des profils de vin différents, adaptés à la consommation à table.

En Suède, 90 % des vins passent par un monopole d’état, Systembolaget. Mais une partie des vins est également vendue en direct auprès des restaurateurs, ou via internet ou par le duty-free. Photo : Mikael Damkier/fotolia

Systembolaget dispose d’un réseau de vente au détail à l’échelle de la Suède de 431 magasins.
Tous ne présentent pas le même assortiment en vins en fonction de leur taille et implantation : six assortiments différents sont possibles. Il est à noter que le monopole propose la vente sur Internet ce qui élargit encore le choix.

C’est d’ailleurs un des points forts du monopole : il apporte à ses clients une offre très vaste.

Bien choisir l’importateur

Le monopole n’achète qu’auprès des importateurs. Il lance plusieurs appels d’offres par an. Les vins peuvent être présents de trois façons au sein du monopole : de manière permanente (deux appels d’offres par an, un en avril un en octobre) ; de manière temporaire (quatre appels d’offres par an, un par saison) ; sur commande. Trouver un importateur en Suède n’est pas difficile : il en existe pratiquement 800. Mais attention, tous n’ont pas le même profil et ne sont pas « actifs ».

Selon le circuit visé (monopole/restauration ou autre), il faut choisir un importateur implanté sur le segment en question. Une dizaine de gros importateurs représentent plus de la moitié des volumes de vins importés. Certains importateurs développent leur propre club des vins. La Suède est un pays où la gastronomie et les vins prennent une part importante. Le meilleur sommelier du monde 2016 est d’ailleurs suédois. Autre point à prendre en compte sur ce marché : comme les autres pays scandinaves, la Suède a la fibre environnementale.

Pour démarrer sur le marché suédois, l’importation privée est moins contraignante que le monopole.

C’est un aspect qui rentre au quotidien dans la vie et les choix des Suédois. Le gouvernement a par exemple instauré récemment une nouvelle redevance pour les vins tranquilles, taxant davantage les bouteilles « lourdes », dépassant le poids de 420 g. Les vins bio ont la cote en Suède. Selon une étude réalisée à la demande de SudVin Bio, les Suédois sont les premiers consommateurs européens de vins bio.

35 000 bouteilles hors monopole

Mais il n’est pas nécessaire d’être en bio pour percer sur ce marché, la preuve en est cette expérience de Lyne Marchive, domaine des malandes, Chablis (Bourgogne) qui commercialise 35 000 bouteilles hors monopole et en capsule à vis.

La Suède apprécie la capsule à vis pour les vins tranquilles : il faut être capable de présenter ce mode de bouchage, et bien  le maîtriser. Photo : frenk58/Fotolia
« Nous commercialisons autour de 35 000 bouteilles par an à destination de la Suède, sur un total de production – en année normale – de 230 000 bouteilles. Nous exportons sur 32 pays. La Suède constitue aujourd’hui notre 3e marché à l’export. Ces bouteilles sont vendues exclusivement à la restauration, je ne travaille pas avec le monopole. Quand j’ai commencé à travailler le marché suédois, il y a 25 ans, j’ai d’abord essayé d’être référencée par le monopole, mais cela n’avait pas fonctionné et sans explication. Par ailleurs, je trouve le système de monopole compliqué, pas forcément très équitable, et quand on peut s’en passer ce n’est pas plus mal. J’ai donc choisi un importateur impliqué sur la restauration. D’abord un petit importateur, qui marchait bien, puis j’ai changé pour un importateur un peu plus important, rencontré à l’union des grands crus. Nous travaillons désormais avec un importateur suédois, Philippsson Soderberg, actif sur la restauration. Pour percer sur ce marché il faut effectuer un vrai travail d’implantation avec l’importateur. Je vais deux à trois fois par an en Suède pour participer à des opérations avec les restaurateurs, des distributeurs. Ce sont des petites opérations (tournées chez des restaurateurs, participation à des formations à la dégustation, des cours de cuisine, sur les associations vin et plats), mais qui font qu’on élargit petit à petit sa présence en restauration. C’est important. Si on ne veut pas se déplacer, il ne faut pas viser ce marché de la restauration en direct. C’est un travail de longue haleine, mais c’est un marché valorisateur. Quand on veut un prix en Suède, si la qualité est là, on l’obtient. »

Une demande pour le PET

Point important à noter : les pays scandinaves apprécient la capsule à vis : il faut être capable de présenter ce mode de bouchage, et bien maîtrisé. « Nos 35 000 bouteilles commercialisées en Suède sont toutes bouchées par capsules à vis. Ce qui se développe là-bas en ce moment ce sont les petites bouteilles en PET. Ils m’en ont demandé. Ils n’ont pas du tout nos a priori. Le client suédois est très pragmatique. La capsule pour ne pas avoir de goût de bouchon, le PET pour réduire le poids et le bilan carbone, etc. C’est un pays où, du moment que vous expliquez les choses, que vous avez des arguments, vous êtes écoutés. Ce sont des gens très ouverts sur nos cultures, très curieux, ils veulent apprendre. »

« La gastronomie est importante en Suède. Chablis dispose d’une bonne notoriété, mais je pense que même des vins peu connus ont leur chance du moment que le rapport qualité prix est cohérent. Il faut être pragmatique et sérieux. Ils sont très rigoureux, un peu comme les Japonais. Et bien sûr comme pour tous les marchés export, il faut être réactifs, répondre tout de suite aux demandes, garder les liens. C’est un marché sur lequel nous comptons progresser encore un peu jusqu’à 40 000 bouteilles maximum, pour garder un certain équilibre entre nos différents marchés ».

Photo : Weseetheworld/Fotolia

Trois importateurs différents

Pour Charlotte de Sousa, Champagne de Sousa, Avize (Champagne), la Suède ne représente qu’un petit marché, mais un marché intéressant : « Nous avons commencé à exporter nos champagnes en Suède depuis 5 ans. C’est un petit marché pour nous, autour de 2 000 bouteilles par an, mais un marché intéressant. Nous y sommes présents de trois façons différentes, avec trois importateurs aux cibles distinctes : via le monopole, en direct par la restauration, et par l’intermédiaire de cours d’œnologie. Le premier importateur, basé à Stockholm est venu vers nous : il est spécialisé sur les vins espagnols, mais avec une gamme bulles large comprenant des champagnes. Il travaille à la fois le monopole et le secteur de la restauration. Pour l’instant, nous sommes référencés par le monopole, mais pas dans tous les magasins. Nous essayons de rentrer dans le monopole de manière constante, mais le point le plus problématique est que le monopole demande des gros volumes. »

Les Suédois sont plutôt axés "nature", en attente de produits raffinés.

Depuis 2014, le champagne de Sousa est monté en puissance sur le marché suédois, et a trouvé un second importateur sur Göteborg, Champagne Huset (= la maison du champagne en suédois) spécialisé en bio (le champagne de Sousa est certifié AB depuis 2010).

« Il fait de l’importation privée pour un restaurant qui ne vend que des vins bio. Notre troisième importateur, Franska bubblor (bulles de France), nous l’avons en fait rencontré via l’association Les Fa’Bulleuses de Champagne, dont nous faisons partie, regroupant sept vigneronnes champenoises. Il importe le coffret des Fa’Bulleuses, comprenant un vin de chaque domaine et prend un peu de champagne à chacune à côté. C’est un profil différent, car cet importateur de Stockholm est sur le créneau de l’apprentissage, par un système de club des vins : il met en place des cours d’œnologie et vend les vins. Nous n’avons que 5 ans de recul, mais je trouve que c’est un marché de connaisseurs. Je me suis rendue plusieurs fois en Suède. Ils sont plutôt axés "nature", en attente de produits raffinés. Ils ont une bonne gastronomie, des bons restaurants. Ils cherchent à comprendre ce qu’ils dégustent. Ils ne sont pas trop attentifs aux médailles françaises, mais davantage à leurs sommeliers nationaux, qui écrivent des livres, donnent des cours, comme Richard Juhlin. Pour démarrer, je pense que l’importation privée est moins contraignante que le monopole, car on a affaire à un seul interlocuteur, et la logistique est plus simple (le monopole demande une logistique spécifique : avec des normes pour la taille des cartons, des codes-barres, etc.) ».

Nouvelle redevance
Les bouteilles lourdes davantage taxées

En Suède l’importation et l’achat de boissons alcoolisées contenant plus de 3,5 % d’alcool ne peuvent se faire que par l’intermédiaire du monopole d’État Systembolaget. Afin de réduire les impacts climatiques dus aux bouteilles usagées en verre, le gouvernement suédois a voté l’introduction d’une redevance supplémentaire sur les emballages dont le but est d’inciter les producteurs à réduire le poids de leurs bouteilles de vin vide. L’instauration de cette redevance concerne les vins tranquilles. Les bouteilles dépassant 420 grammes seront assujetties à cette redevance, proportionnellement au dépassement en poids. La réforme s’applique dès les vendanges 2016 pour les vins millésimés et au 1er janvier 2017 pour les vins non millésimés vendus dans le monopole.

Focus consommation
Les vins français sont appréciés

La Suède est un marché non négligeable pour les vins français. Elle fait en effet partie des pays pour lesquels la consommation de vin est en hausse depuis plusieurs années. Située entre la Finlande et la Norvège, la Suède compte plus de 9,5 millions d’habitants. C’est le plus peuplé des pays scandinaves. La consommation de vin est supérieure à 200 millions de litres par an. La consommation par an et par habitant s’élève à 20,7 litres. La Suède importe quasiment 100 % des vins consommés (il existe cependant quelques domaines viticoles en Suède). Le marché est intéressant en volume mais aussi en valeur. La Suède a un des niveaux de vie les plus élevés d’Europe. Par ailleurs le consommateur suédois est plutôt ouvert et n’hésite pas à tester des vins qu’il ne connaît pas. La notoriété est un plus - comme partout - mais n’est pas un facteur indispensable pour plaire aux amateurs de vins suédois. La France est bien placée sur ce marché : en 2014/2015, elle se place au 3e rang des pays fournisseurs de vins en volume, et au second rang en valeur. La Suède est ouverte aux vins du Nouveau Monde, qui ont progressé sur ce marché ces dernières années, mais elle ne tourne pas pour autant le dos aux vins du vieux continent. Les vins français y disposent d’une belle image de marque.
Le marché est principalement orienté sur les vins rouges (deux tiers des volumes), devant les blancs et une part très anecdotique des rosés (2 à 3 %) selon les années.

 

Article paru dans Viti n°416 de mai/juin 2016

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